« Dans le secret des arbres paupières » – Galerie Segolene Brossette

Texte de Eva MARTIN

Dans la galerie située au 15 rue Guénégaud, au milieu des œuvres de Nathalie, on peut trouver sur le mur de droite un éparpillement de photos, d’images et de découpages. Une famille des années 30, un chien en noir et blanc, des jeunes enfants pourvus de grands rubans, cette flopée d’éléments divers est la source d’inspiration de l’artiste. Elle récupère, collectionne et observe ces souvenirs qui ne lui appartiennent pas forcément. On pourrait retrouver ces visages découpés dans nos vieux albums de famille, à la fois inconnus et familiers. L’artiste peut passer des heures et des nuits à les contempler sans s’exécuter. Et puis soudain, elle transforme les éléments de ces images perdues en motifs constituants ses multiples dessins. Dans un mélange de mine graphite et d’encre sur papier chinois, souligné au pastel ou au crayon de couleur, ces leitmotiv vont parcourir l’ensemble de ses oeuvres. On retrouve l’oiseau, la jeune fille au visage sombre, le cerf couronné de ses grands bois. Mais aussi des jumeaux, la symétrie des regards et des ailes de papillon. Des motifs doubles, inséparables « ils sont face à face et face à nous, ils nous regardent et nous accaparent dans cet espace flottant » décrit fascinée la galeriste Ségolène Brossette. Des formes se répètent sans cesse sous nos yeux, et pourtant, impossible de les identifier précisément. Faire face aux oeuvres de Nathalie Tacheau, c’est ressentir le sentiment confus d’un réveil suivant une nuit pleine de rêves, désormais tous insaisissables depuis que nous avons ouvert les yeux.

Les arbres Paupières : un regard sur soi

Mother, c’est le tableau phare de l’exposition nous informe Ségolène Brossette. Les touches fines de couleurs et le mystère ambiant pourraient expliquer son grand succès. Mother, c’est un visage dont l’oeil gauche est couvert d’un oiseau. Mother, c’est un buste mouvant fait de tiges, de lianes, de feuilles et de fleurs. Le dessin de l’oiseau est superposé sur le tableau, il voile le regard fixe du visage pourvu d’une expression absente. Ce regard est dirigé vers l’intérieur, attentif et introspectif. Les «arbres paupières» permettent une immersion dans le subconscient, omniprésent dans l’univers onirique de l’artiste.

Nathalie Tacheau « Efface tout lien de domination entre l’homme et la nature», elle décide de les entremêler et non de les hiérarchiser. « Elle parle avec les animaux, je me rappelle que dans la cour de la galerie, il y avait quelques chiens quand elle était venue, c’était impressionnant de voir la facilité du lien qu’elle arrivait à créer avec eux ». Les arbres flottent dans l’univers de Nathalie. La Nature se retrouve aussi dans une sexualité dessinée à travers l’évolution de toutes les parties qui composent l’humain sauvage et instinctif.

Collection L’oeil

Dans la série des ombres, 2019 – Segolene Brossette

Si vous n’avez pas eu la chance de voir cette exposition, je ne peux que vous conseiller de suivre la suite de son parcours dont les prochaines étapes sont le SALO IX Salon du dessin érotique du 22 au 25 juillet et « Le Boudoir » à l’Atelier OOooh du 10 juillet au 7 aout, rue Lazare Carnot à Lorient.